/b/u/g/ on Mon, 24 Sep 2001 08:36:44 +0200 (CEST) |
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[nettime-fr] Starhawk - Après Genes, pourquoi nous devonsrester dans la rue |
Après Gênes, pourquoi nous devons rester dans la rue Par Starhawk Depuis Gênes, de nombreux débats tout à fait sains ont eut lieu pour déterminer sur les perspectives du mouvement contre la globalsation économique. Les manifestations de masse se font bien plus dangereuses et plus difficiles. Les sommets sont déplacés vers des endroits inaccessibles. Le FMI, la Banque Mondiale, le G8 et l'OMC poursuivent leurs affaires. Ce que nous faisons est-il suffisemment efficace pour justifier les risques que nous prenons ? Ne devrions nous pas nous concentrer plus sur le travail local, en construisant jour après jour nos réseaux et notre organisation ? J'étais à Gênes. De par ce que j'y ai vécu là-bas, y compris les moments de véritable terreur et d'horreur, je suis plus que jamais convaincue que nous devons rester dans la rue. Il faut continuer à monter des [initiatives de grande envergure], à contester les sommets, à travailler à une échelle globale. Nos initiatives globales ont été extraordinairement efficaces. J'ai entendu des avis désespérants qui affirmaient que les manifestations n'avaient finalement eu aucun effet sur les travaux du G8, de l'OMC ou du FMI/Banque mondiale. En fait elles en ont eu. Elles ont, de façon significative, modifié les ordres du jour et la propagande qui en a découlé. De toute façon la politique actuelle de ces institutions sera la dernière chose qui changera. Mais pour la plupart d'entre nous dans la rue, notre objectif n'est pas de modifier le débat au sein de ces institutions. Notre propos est de saper leur légitimité, de mettre en lumière leurs programmes et leurs politiques et de faire croître le coût social de leur existence, jusqu'à ce qu'il soit insupportable. L'opposition aux sommets a délégitimé ces institutions comme aucun groupe local n'aurait pu le faire. Les grands sommets obéissent à des rituels élaborés, ce sont des manifestations ostentatoires de pouvoir qui confortent le crédit et l'autorité des corps qu'ils représentent. Quand ces corps sont contraints de se réunir derrière des murs, de mener une bataille de rues à chaque conférence, de se retirer dans des endroits isolés, le rituel est brisé et leur légitimité est sapée. Les accords qui étaient négociés en secret sont placés sous les projecteurs d'un examen public. Le mensonge qui voudrait que la globalisation soit synonyme de démocratie est révélé au grand jour ; et le masque de bienfaisance tombe. Des organisations locales ne peuvent tout simplement pas arriver de façon aussi aussi efficace à un tel résultat comme peuvent le faire les grandes manifestations. L'organisation au niveau local est vitale, et il y a beaucoup d'autres choses qu'elle peut faire : le travail social, l'éducation, la construction du mouvement, la création d'alternatives possibles, l'amélioration de quelques-uns uns des effets immédiats de la politique globale. Nous ne pouvons et ne voulons abandonner le niveau local et, en fait, nous ne l'avons pas fait : beaucoup d'entre nous travaillent sur les deux niveaux. Personne ne peut aller à tous les sommets, nous avons tous besoin de nous implanter dans nos propres communautés. Mais beaucoup d'entre nous en sont venus aux actions plus larges, plus globales, parce que nous comprenons que les accords commerciaux et les institutions que nous contestons sont destinés à défaire notre travail local et prendre le pas sur les décisions et les aspirations des communautés locales. Nous pouvons faire du renforcement des réseaux et des organisations locales l'objectif conscient de chaque initiative globale. A part Washington DC, Bruxelles ou Genève, qui n'ont pas le choix, plus aucune ville ne voudra désormais accueillir une de ces réunions internationales. Nous entendons même maintenant des rumeurs qui affirment que que Washington pense à changer le lieu du prochain congrès de la Banque mondiale et du FMI. Mais si nous trouvons des moyens d'organiser des actions de masse qui laissent derrière elles des ressources et des coalitions opérationnelles, alors chaque initiative globale peut renforcer et soutenir le travail local qui se poursuit sur une base quotidienne. Les sommets ne resteront pas longtemps les merveilleuses et appétissantes cibles qu'ils sont. Sur les deux dernières années nous avons bénéficié d'un programme de réunions qui avait été décidé et négocié avant Seattle. Maintenant qu'ils tiennent leurs réunions dans des lieux toujours plus secrets et isolés, nous devons élaborer une stratégie qui nous permette de continuer à produire de la dynamique. Par exemple, certains d'entre nous ont parlé d'actions régionales, coordonnées, à une grande échelle, ayant pour cibles les Bourses et les institutions financières lorsque l'OMC se réunira à Qatar en novembre. Le message que nous enverrons sera : « Si vous transposez les sommets loin de notre portée, et si vous poursuivez vos politiques de concentration du pouvoir et des richesses, alors l'agitation sociale se déploiera sur ces institutions spécifiques pour défier la structure du capitalisme global elle-même ». Des marches, des conférences, des contre-sommets, des programmes d'alternatives positives ne peuvent pas à eux seuls s'élever, à ce niveau de menace envers l'édifice du pouvoir, mais ils le peuvent s'ils sont associés à l'action directe au niveau que nous avons atteint maintenant. Bien sûr, plus nous réussissons, plus ils deviennent taigneux. Mais lorsqu'ils utilisent la force contre nous, nous gagnons quand même, même si le prix de la victoire est très élevé. Les systèmes de pouvoir se maintiennent grâce à notre crainte de la force qu'ils peuvent déployer, mais la force coûte cher. Ils ne peuvent pas se maintenir s'ils doivent, à chaque fois, user de la force pour fonctionner normalement. Gênes a été une victoire remportée à un prix épouvantable. J'espère ne jamais revivre une nuit comme celle que j'ai passée quand ils ont attaqué le Centre de médias indépendants et l'école Diaz, sachant que des atrocités étaient commisent juste de l'autre côté de la rue et que je ne pouvais rien faire. Le prix à payer me fait souffrir, me remplit de chagrin et me met en rage. Je ferais presque n'importe quoi pour être certaine que personne, et surtout pas un jeune, n'ai à nouveau à souffrir d'une telle brutalité. Presque n'importe quoi. N'importe quoi excepté me retirer du combat. Parce que ce niveau de violence et de brutalité on le retrouve chaque jour partout dans le monde. Ce sont quatre étudiants abattus en Nouvelle Guinée, c'est la fermeture d'une école au Sénégal, les quotas de travail dans une maquiladora à la frontière mexicaine, l'abattage d'une forêt en Oregon, le prix de l'eau privatisée au Cochabamba. Ce sont encore les violences infligées aux corps de jeunes, surtout aux jeunes de couleur, dans les prisons partout aux Etats-Unis, la brutalité et le meurtre qui se développent en Colombie, en Palestine au Venezuela. Et c'est aussi le complet mépris de l'intégrité des écosystèmes où nous vivons tous. Je ne vois pas l'alternative entre le danger d'une action d'envergure et la sécurité. Je ne vois plus aucun endroit où l'on soit en sécurité. Ou plutôt, je vois que, à long terme, le chemin le plus sûr est d'agir avec force, maintenant. Le choix est de savoir quand et comment contester les pouvoirs qui tentent de bloquer tout espace politique à une réelle opposition. A Gênes il est clairement apparu qu'ils se battront sans [pitié] pour défendre la consolidation de leur pouvoir, mais il nous reste beaucoup d'espace pour organiser et monter des initiatives globales. Il nous faut défendre cet espace en l'utilisant, en le remplissant et l'élargissant. Soit nous continuons à les combattre tous ensemble maintenant alors que nous pouvons mener des actions efficaces d'envergure ; soit nous les combattons plus tard, par petits groupes isolés, ou seuls, quand ils enfonceront les portes de nos maisons en pleine nuit. Soit nous menons cette lutte tant qu'il y a encore des forêts vivantes, des rivières qui coulent, et que l'éco-système de la planète peut encore s'adapter ; soit nous les combattrons quand le préjudice sera encore plus important et l'espoir d'y remédier bien plus faible. Nous avons beaucoup de choix quand à la façon de mener la lutte. Nous pouvons être plus stratégiques, plus créatifs, plus performants dans ce que nous faisons. Nous pouvons apprendre à mieux préparer les gens à ce qu'ils vont devoir endurer et à mieux les aider ensuite. Nous devons nous poser des questions fondamentale à propos de la violence et de la non-violence, de nos tactiques et de notre vision à long terme dont j'espère parler dans un prochain texte. Mais ces choix ne peuvent exister qu'autant que nous préservons un espace pour le faire. Nous devons nous développer, et non diminuer. Nous devons explorer et revendiquer de nouveaux territoires politiques. Il faut que les actions de cet automne soient plus grandes, plus sauvages, plus créativement [outrageantes] et exemplaires que jamais, que ce soit pour les actions contre le FMI et la Banque Mondiale à Washington DC fin septembre ou pour de nombreuses actions locales et régionales en novembre quand l'OMC se réunira à Qatar. Nous devons rester dans les rues. 5 septembre 2001 Copyright © 2001 Starhawk (http://www.starhawk.org). Reproduction autorisée si cette notice de copyright est préservée. Version originale publiée sur Alternet (http://www.alternet.org). Traduction de l'anglais (américain) par Aris Papathéodorou et Germinal Pinalie. -------- Texte publié sur s a m i z d a t . n e t Don't hate the media, become the media ! http://infos.samizdat.net _____________________________________________ #<nettime-fr@ada.eu.org> est une liste francophone de politique, art et culture lies au Net; annonces et filtrage collectif de textes. #Cette liste est moderee, pas d'utilisation commerciale sans permission. #Archive: http://www.nettime.org contact: nettime@bbs.thing.net #Desabonnements http://ada.eu.org/cgi-bin/mailman/listinfo/nettime-fr #Contact humain <nettime-fr-admin@ada.eu.org>