Louise Desrenards on Sun, 6 Jun 2004 21:45:23 +0200 (CEST)


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[nettime-fr] Le risque de l'art


        Je veux juste souligner que déborder d'activité connotée par le
politique désigne la préocupation sociale mais le sépare réellement de
l'objet de son environnement, sans lequel ni connaissance ni sensibilité des
problèmes ne peut être donnée de façon probable à propos d'une discussion
brève montée sur la liste spécialisée à propos du développemetn en
programmation qu'est "empyre", qui s'entrechoque avec l'actualisation
exceptionnelle du problème posé par la répression vraie des artistes
américains, ou la sratétgie interventionniste (impossible de discerner et
sans doute plusieurs circonstances se sont elles rejointes) initiée par
Critical Art Ensemble à propos de la terrible disconvenue qui a frappé Steve
Kurtz de contrôle et de désordre sous le Patriot Act appliqué par le FBI.

Je pense vraiment que dans l'art contemporain, la programmation numérique et
le travail en ligne, un énorme problème est en train d'apparaître avec
évidence: il y a une dichotomie totale entre la tendance de la compréhension
cognitive des phénomènes, et la préocupation objective ciblée des acteurs
artistiques et programmeurs. Les raisons ne sont pas liées au manque
d'intention ou aux mauvaises intentions. Elles relèvent d'une erreur
d'évaluation des agents objectifs partenariaux des systèmes que cela
implique : l'homme vivant en société d'une part, ses outils de
représentation et de langage d'autre part. Et s'il y avait altérité des
langages numériques ?

Autant dire, à le dénier si l'hypothèse est valide, ce qui pourrait devenir
rapidement une arriération des méthodes et des préocupations à l'horizon des
langages auxquels on attribue plus de vertus qu'ils n'en ont et notamment
éthique ;-) en croyant leur attribuer du social (et du politique) à travers
l'habillage graphique ou l'apparence organique de la programmation, ne
s'agissant en fait que du sujet traité et non de la structure, ou de la
structure non du sujet, et séparant le double propos technique/social,
croyant le représenter unifié. Tout autre injection de réalité ne
confèrerait donc pas à l'éthique mais à l'idéologie.

Il règne donc une menace réelle de corporatisme chez les experts en
programmation, liée d'autre part à l'inaccessibilité d'outils complexes,
supposant l'exclusive technologique et techno-scientifique des savoirs et
des apprentissages qui leur sont attachés, pour pouvoir communiquer et
produire des représentations, de la connaissance, ou des projets, dans leur
cadre. Un racisme, peut-être aussi, peut émerger de l'expertise si elle
rompt avec le pacte social des libertés, mais nous ne le dirons pas
précisément ici, car cela introduirait la morale, et de toutes façons
écarterait de l'appel à réflexion sur le fond, que nous souhaitons soumettre
ici.

D'une autre façon, il faut cependant poursuivre d'apprendre à lire et à
écrire physiquement, manuellement, intellectuellement, biologiquement, tout
un apprentissage lié au rapport du corps dans l'espace temps matériel pour
partie déterminé ou pré-déterminé par l'histoire et la culture des
individus, la culture et l'éducation des agents de l'éducation compris, les
topologies, pour partie aléatoires. En quoi demeure toujours la puissance
critique du body art ou du bioart, critiques y compris de leurs outils de
communication, aujourd'hui communs à tous, que sont le mulmtimedia et
l'hypermedia. Il suffit de se reporter à l'événement politique désastreux
qui frappe actuellement les artistes de Critical Art Ensemble, en se disant
que cela pourrait-il être leur stratégie critique interventioniste, il n'en
resterait pas moins réel que de toutes façons le scénario fut logique, à
l'horizon prédictif du Patriot Act. Où l'artiste voit la faille elle peut se
produire et il s'y met en risque, un peu comme le firent les demiurges
d'autres cités, qui après voir fait la guerre du Péloponèse en tiraient
partie de l'attribution collective de la tragédie, et aujourd'hui en
accéléré, quasiment intégré en temps réel.

Comment décider qu'il y aurait privilège du mode biologique sur le mode
bio-technique ou technologique ? sinon pragmatiquement sachant la vie
humaine expérimentale d'elle-même et socialement en premier lieu, sans
laquelle il n'y aurait pas matière à production ni à réflexion. Je reste
donc existencialiste entre autre. D'autre part à savoir la vie en société
dans la scène de son cadre matériel, sous l'angle matérialiste des
ressources et du développement critique.


        Je ne sais pas si cela est lié aux systèmes binaires ou quelque
chose ne remet pas en question la hiérarchie des nombres ou du moins leur
statut économique, ni la dialectique y compris en matière de robotique ;
nous avons aujourd'hui les machines sémiotiques qui loin des nombres nous
parlent de la fluidité et de la plasticité des signes d'une façon autrement
actuelle, et tout aussi puissance ; je ne connais pas la source des systèmes
experts ni du système nano donc je ne pourrais rien en dire par rapport à
mon sujet, ne cherchant pas à prouver que mon raisonnement soit connoté de
vérité ; il s'agit simplement d'une réflexion philosophique au niveau de ma
citoyenneté lambda.

Il demeure cette contradiction que les catégories aristotéliciennes soient
étrangement opérationnelles dans le monde imaginaire autour du numérique,
alors qu'elles y sont au contraire pulvérisées par le changement de qualité
et d'échelle abstraits du langage des nombres, sans relation de structure
sinon la forme elle-même, indifférente, avec les représentations techniques
liées au rapport d'équivalence de la mesure et de la nature, qui activèrent
tout notre dispositif commun depuis plus d'un millénaire et jusqu'à il y a
peu d'années encore.

Or cela empêche le changement de deux façons : la première est que la
connotation imaginaire sociale pragmatique ne correspondant pas à la réalité
constitutionnelle de la mise en oeuvre, ceci crée un effet d'erreur
prédictible quant aux objectifs ou aux intentions ; il n'y a pas de rapport
de réalité effective entre les caractéristiques de l'instrument, ce qu'il
produit, et ce qui lui est attribué humainement sinon leur mise en risque
respective ou réciproque incalculable ; la seconde : ces représentations ne
permettent pas d'imaginer d'autres projets que la reproduction du système
qu'elles poursuivent de signifier idéologiquement, et quel que soit
l'avancement révolutionnaire de l'instrument utilisé.

En quoi cela consiste-t'il en regard du monde extérieur et par rapport à
quelles données je me pernets de le dire ? Je vois la montée scientifique de
la connaissance de l'environnement affectée proritairement à tous les objets
observés peu importe dans le cadre de quelle discipline.


        Dans le cadre des nouvelles théories, par exemple en matière de
recherche sur le cancer, en Biologie, etc, on sort du paradigme divin de
l'unité objectacle issue des catégories d'Aristote ; cela vaut pour
l'espace, cela vaut pour le temps : cela vaut concernant l'actuelle
déclassification hérarchique des éléments, attachée à la vision prioritaire
et ordonnée aristotélicienne (s'il en était autrement d'Aristote, alors cela
aurait disparu des manuscrits anciens manipulés ou "révisés" par quelque
pouvoir d'église) etc...

On repart des premiers matérialistes tel Gianbattista Vico, et on intègre
l'empirisme du XVIIIè siècle à la phénoménologie compréhensive, aujourd'hui.
On intègre aussi totalement parties oubliées de la théorie de Darwin (sans
lesquelles on en ferait une théorie réductionniste sur l'évolution) : le
hasard sélection - s'il intègre l'importance des circonstances elles
demeurent diffuses et jamais ne peuvent ressortir d'une attribution
utilitaire spécifique ni attachée fatalement à un effet quelconque, sauf à
le constater non prédictif de stabilité, et sauf en terme d'activité. Car
étant précisément actives et interactives, ces données ne cessent de changer
et leurs effets de se modifier.

Au-delà de la question même du rapport de la forme et de la fonction qui
traversa toute l'histoire de la modernité technique et industrielle,
attribuer le cou de la giraffe à la hauteur de l'arbre au sommet duquel elle
va chercher sa nourriture serait non seulement primaire, mais l'exemple même
d'une vision aristotélicienne de Darwin, en strates d'états pas si loin de
la rhétorique de la flèche de Zénon, qui en aucun cas ne pourrait rendre
compte de la complexité de sa théorie, au point où elle inspire la critique
radicale de la biologie génétique modléculaire aujourd'hui.

Il y aurait d'autre part en anthropologie, chez Darwin la notion cognitive
de lenteur de l'éducation chez l'homme, de la longevité de la vie humaine à
la longue durée de l'histoire de l'humanité, comme un facteur réversif de
l'évolution hors du commun aux autres espèces - je prolonge : ou objets
vivants sur terre -, où l'homme en société trouverait à la fois le facteur
de son développement intelligent particulièrement dynamique, et d'autre part
une constitution critique singulière - lui étant attachée spécifiquement.

Le monde vivant en partie perceptible et en partie imperceptible, notamment
les flux ne peuvent permettre de nommer fixement des objets étant en
perpétuelle variation ou transformation ; ce qui est repérable alors ce sont
essentiellement leurs événements à un moment donné plus ou moins bref ou
long : toute une zone de recherche désignée à laquelle se confronte la
Physique des particules aujourd'hui - qui l'intègre. L'importance de
l'interactivité entre la diversité des phénomènes affecte les sujets d'une
métamorphose déterminante mais pas nécessairement pré-déterminée, dans le
cadre du hasard sélection, à un moment donné des circonstances matérielles
perceptibles ou imperceptibles, ou des opportunités (s'agissant du social).

La question, alors, est celle de l'environnement, conçu comme univers
plastique des circonstances, privilégié dans ces grandes théories
scientifiques en renouvellement paradigmatique aujourd'hui. Flux,
évenements, phénomènes, nous éloignent du sujet qui fut l'objet réducteur de
l'attention des recherches. La question ce n'est pas de connaître tous les
attributs réalisés de la cellule cancéreuse, ni du génôme, ou plutôt, si de
toutes façons nous en sommes arrivés à ce moment du savoir, c'est pour
constater que la vie ne consiste pas en cela, mais en une dynamique complexe
sans exclusive des agents qui peuvent entrer en cause, dans la manifestion
soudaine ou habituelle ; c'est de comprendre que ce savoir discriminant qui
énonce élémentairement la structure ne résoud aucun des problèmes posés par
son existence, ni même à la façon qu'elle a de pouvoir exister. A savoir que
la structure elle-même est relativement instable, du moins n'est pas
immuable, ni totale - sauf à être un paradigme de dieu. Les galets que l'on
trouve sur les plages ne seraient ce qu'ils sont sans l'érosion à plusieurs
moments et de plusieurs sources, leurs couleurs rspectives ne seraient pas
sans l'oxydation, etc. Un clône n'intègre pas toutes les données extérieures
qui rendent le génôme opératoire, pour ce qu'on sait autrement de la vie à
le constater, même si cela préside à des naissances qui fonctionnent
relativement, etc...

Les agents du mouvement du monde et de la vie sont conçus en nombre infini -
qu'il serait donc vain de pouvoir prétendre circonscrire sous le nouveau
regard scientifique - sinon en termes de probabilité. D'où l'importance du
retour des statistiques dans l'appareil méthodologique ; après avoir assuré
des preuves, aujourd'hui elles servent à imaginer des prédictions dans le
principe d'incertitude. Cet usage conférant à l'héritage de philosophies
matérialistes non dialectiques s'effectue dans une immersion culturelle des
philosophies anlaytiques et des théories du langage, y compris les langages
de l'art, consensus à l'horizon de la communication et de la cybernétique.
La perception directe des agents en nombre infini est imprédictiblement
possible, elle échappe aux dispostions de l'objet tel qu'on le décrit et on
le nomme. Cela désigne les conditions de production de phénomènes
artificiels sans rapport d'équivalence avec les modèles vivants qui les
supportent croyant les faire identiques ou en prolongement.

Ou l'on voit que la disparition de la validité théorique du principe de
l'équivalence, par exemple en économie, n'est pas sans cohérence de la
vision dans les autres domaines. Si les scientifiques ont pu se préocuper de
la clé paradigmatique de la finitude, aujourd'hui ils sont confrontés à la
réalisation de l'infini, qui leur désigne un défi métaparadigmatique : le
concept même de l'environnement sans rapport à l'éloignement ni à la
dimension ; loin des catégories d'Aristote et du dispositif technique
moderne.

L'infini innommé, inombrable, mais peut-être pas impensable quoique jamais
en maîtrise de totalité ni comme contrôle, au moins étant impensé existant
probablement, c'est aussi l'altérité, la mort (par exemple, la mort de la
domination du savoir à l'horizon de la connaissance qui affirme l'acte
improbable) : en quoi on peut comprendre l'énergie d'oppposition rencontrée
par les scientifiques qui travaillent dans ce sens.


        L'altérité c'est la mort. Y a t'il altérité des langages numériques,
étant hors d'équivalence naturaliste ? En quoi l'objet social utilitaire de
ces langages devrait-il se dépasser dans le champ artistique sinon au titre
ludique ou de l'excellence applicable à la performance ? Ne s'agissant pas
du domaine éthique a fortiori pourquoi en rajouter avec la valeur, ou la
morale ?  Moi je pense que le territoire des arts numériques est celui de la
sublimation, non de la technologie elle-même mais de l'homme, qui s'extrait
en liberté du cadre des sa prescription ; il dévoie la ressource. S'il y a
du politique, c'est qu'il entre dans le champ symbolique, ce n'est pa parce
qu'il parle des misères du monde.

Les civilisations qui dénient la mort, qui se veulent éternelles pour le
monde, dénient l'altérité. Tel paraît être l'axe à partir duquel on peut
comprendre les nouvelles manifestations artistiques dans une perspective
critique.

Le comportement du FBI devant le corps de "Hope", épouse vraie ou fausse de
Steve Kurtz et de toutes façons au nom et au corps propres symboliquement
réels de notre vie, morte d'une crise cardiaque dans la nuit du 10 ou 11 mai
2004, est celui qui n'accorde pas de statut symbolique à la mort en regard
de la vie, sinon l'erreur de la vie, la mort ne consistant qu'en accident
mortel. A ce titre la mort n'est pas respectable et le corps mort n'est
qu'un déchet, sauf à pouvoir être instrumenté ou recyclé (les greffes
d'organe) ; sans doute est-ce la raison qui explique jusqu'où
l'interprétation policière d'un type qui fait de l'art critique avec de la
biogénétique aille jusqu'à imaginer qu'il put prélever des corps cellulaires
sur le corps de sa femme défunte, ce que fait couramment la médecine dans le
cadre de l'autorisation permanente. Ici, bien au contraire, l'artiste
désemparé par la mort, loin de l'instrumenter appelle des secours. Mais
comme artiste il devient Mabuse égal à la vision de pouvoir du FBI...

A ce point, je me priverais de tout commentaire sur l'instrumentation qui a
suivi le 11 septembre, car cela signifie aussi bien que la catastrophe
elle-même pût faire partie du scénario. La critique de Kurtz est à
l'intérieur de ce système, ainsi que le travail de Critical Art Ensemble est
intense ; en ceci l'interventionisme n'est pas une distance à l'objet
critiqué, mais l'intégration de la déviance similarisée dans le dispositif
aléatoire où elle coexiste avec sa cible ; rencontre possible-impossible
mais prédite et évaluable, activité elle-même et par conséquent,
interventionisme se donnant comme environnement probable-improbable
lui-même. Où l'on décèle le risque encouru. Car de l'autre point de vue,
celui du FBI qui en ressent l'interférence étrange alors qu'il ignore
l'altérité, comment ressentir la différence entre la stratégie et l'impact ?
Et d'ailleurs à ce point, il n'y en a peut-être pas.

C'est extrêmement puissant sur le plan critique et politique mais réellement
dangereux dans le tissu sensible pour l'artiste lui-même, on peut dire
subversif et collectivement de toutes façons, oui. Au point que c'est
peut-être le FBI sans le savoir qui par répression introduisant le désordre
dans les données tactiques, a retourné la situation critique en subversion.
Au point que l'engagement de Kurtz situe sa visée bien au-delà de la portée
d'une arme. Nous sommes loin du dispositif situationniste mettant en abîme
la société du spectacle, en dépit d'apparents emprunts, nous nous
trouverions dans le mal lui-même, son traitement homéopathique nous-mêmes.

Quid du Grand Jury ?

L.





 
 
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